Le thermomètre indique -12 en ce matin de janvier. Le bon moment pour moi d’aller (re)faire un tour dans un de mes endroits préférés de Strasbourg : l’Île du Rohrschollen.

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Ambiance gelée ce matin de janvier dans la forêt alluviale primitive rhénane de l’Île du Rohrschollen.

Une île hors du temps qui évolue… dans quel sens ?

L’île du Roschollen, je vous en ai déjà parlé à de nombreuses reprises sur ce site web : pas moins de 9 articles (10 avec celui-ci) vous parlent de cet endroit à part de Strasbourg.
Parmi les derniers vestiges de la forêt primitive Rhénane, l’île est gérée par l’EDF qui se donne ainsi bonne conscience maintient un îlot et un écosystème en place à moins de 10 km du centre ville de Strasbourg.
310 hectares de forêt alluviale sont ainsi préservées depuis 1997.

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L’observatoire à oiseaux de l’île du Rohrschollen

Des travaux conséquents aux alentours de 2014-2015, (financés par le programme européen LIFE) ont permis de remettre en eaux une partie de l’île grâce à un système de vannes qui inondent des morceaux de forêt (humides, donc).
Une grosse campagne de communication a ensuite été mise en place par l’EDF.
Télé, radio, web, et même tractage place Kléber pour inciter les gens à venir voir cet écrin hors du temps et la nouvelle passe à poisson qui permettra à coup sur au saumon de reconquérir le Rhin…
Moi, ce que j’ai surtout vu de mes yeux en 10 ans : cet endroit sauvage et préservé est devenu le terrain de prédilection de pêcheurs dégueulasses qui laissent trainer leurs canettes et ordures après avoir passé plusieurs heures à tenter de sortir du poisson sous les yeux moqueurs des aigrettes et autres hérons…
Je n’ai rien absolument rien contre la pêche, bien au contraire (voir article). C’est même un ami pêcheur qui m’a montré ce lieu il y a + de 10 ans. Mais pêcher, c’est savoir lire les eaux, chercher les mares en parcourant la forêt, taquiner le poisson, le respecter, l’admirer, et le relâcher après avoir eu le plaisir de lutter pour le sortir de l’eau.
D’autres envisagent la pêche de cette manière : on pose un tabouret, on ouvre ses canettes, on va faire caca derrière les buissons, on mange ses conserves de maquereaux, on sort le + de poisson possible sans le remettre à l’eau et on rentre chez soi ivre (en laissant derrière soi des ordures).
Cet endroit peu fréquenté et hors du temps est donc devenu sacrément dégueulasse et la présence humaine se voit beaucoup trop à certains endroits… Dommage.
Heureusement, certains coins restent un peu moins fréquentés et on arrive encore (un tout petit peu) à se sentir en dehors des hommes. Pour combien de temps ?

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Malgré le manque d’eau, je croise quelques spécimen de coin coin dont je ne peux vous donner le nom. Je suis photographe, pas ornithologue.

L’île du Rohrschollen : jungle rhénane par -12°C

J’aime fréquenter ce lieu. Surtout à l’automne ou en hiver. L’été, cette jungle rhénane est tellement dense qu’on peine à sortir des sentiers balisés. Sans parler des moustiques et des tiques dont je ne suis pas très fan.
J’ai souvent croisé de la faune dans ces lieux : biches, daims, sangliers… Sans parler des oiseaux et des insectes qui trouvent un refuge précieux dans cet endroit particulier.
Lorsque je sors de la voiture, emmitouflé dans ma veste par -12°C, je prépare donc mon appareil photo à ces rencontres éventuelles, pour ne pas être surpris et ne rien rater (comme ça m’est parfois déjà arrivé).

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J’ai deux idées photo précises en tête ce matin :

  •  surprendre et immortaliser de la faune. La végétation est moins dense et permet + facilement ce type de rencontres. Je connais les coins ou je peux croiser des sangliers (voir article). Je marche donc le + silencieusement possible et j’ai pré-réglé mon boitier et monté un objectif long.
    Avec ces températures très froides et l’heure matinale, j’ai bon espoir d’être seul sur l’île.
    Si je suis chanceux, le gibier n’a pas encore été dérangé et ne s’est pas encore caché.
    Erreur : au bout d’1km, je tombe sur le premier poste de pêche déjà squatté par 3 pêcheurs, leurs canettes de bière et leur papier toilette souillé derrière des buissons.
  • deuxième challengephoto : saisir l’ambiance particulière des lieux avec des températures aussi basse. Les mares et méandres doivent être totalement gelées. Grosse déception, et grosse surprise : l’eau est quasiment absente des lieux. Les mares sont asséchées, les canaux sont à un niveau extrêmement bas que je n’ai jamais observé en ces lieux… L’île et gelée, mais l’eau est quasiment absente… J’avais déjà pu photographier le vieux lit du Rhin à sec en 2014 (voir article), mais je n’avais jamais vu l’Île du Rohrschollen à ce point asséchée.
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Ya comme un problème de niveau d’eau à l’île du Rohrschollen…

Changement d’objectif pour la sortie photo

Je me retrouve donc le bec dans… l’eau. Même si l’endroit dégage tout de même cette ambiance particulière, je suis un peu déçu…
En matière de faune : un écureuil vient me saluer, je lui rends la politesse en lui tirant le portrait. Des canards (ou des oies) font les effarouchés et restent à une distance raisonnable (un peu trop loin pour moi).
En matière de photo de paysage : la glace est bien présente, malgré la cruelle absence d’eau.
Ma sortie photo prend alors une tournure totalement différente que celle envisagée et je décide de changer mon fusil d’épaule.
En observant un peu les berges et le fond des canaux, je me rends compte que le gel a pris avant que l’île soir vidée de son eau… Il doit y avoir une logique, même si elle m’échappe : les ingénieurs EDF en savent bien + que moi sur la gestion écologique d’un lieu et ont appuyé sur le bouton des vannes pour une raison précise.
Moi, je change de regard. Je me concentre sur les détails, j’essaye d’appréhender l’ambiance, de trouver des points de vues insolites.
Je varie les focales en fonction de ce que je veux montrer.
Le soleil vient éclairer la scène de sa douce lumière matinale de janvier, me permettant de jouer avec sa présence.

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Une fleur de glace ?

L’Île du Rohrschollen : photogénique mangrove gelée en janvier

Après 2 heures passées sur place, je décide de plier bagage et me dirige vers le dernier lieu photogénique que j’ai en tête à proximité de ma voiture.
Il ressemble à l’idée que je peux me faire d’une mangrove (sans la mer), même si je n’ai jamais été voir une mangrove de près (je me contente déjà de connaître correctement les lieux qui composent mon environnement proche).
La satisfaction est au rendez-vous : l’eau est présente, les lieux sont gelés, et le soleil m’offre un contre-jour bien venu pour valoriser les lieux.
Je passe encore une petite demi-heure sur place à varier les vues et à profiter du silence.
Je regagne ma voiture rapidement, range mon matériel, un peu transi et un peu triste de ne pas avoir aperçu de gibier.
Je démarre ma voiture, roule 100m. Et une biche, gracieuse, vient me narguer en passant juste devant mon capot. En quelques bonds, elle est à couvert dans la forêt et me laisse pantois au volant.
Attentif pendant toute la matinée, et prêt à dégainer rapidement mon appareil pour immortaliser des rencontres animales, il aura fallu que mon matériel soit inaccessible dans le coffre pour que le gibier se montre. Comme pour se moquer de moi…

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De superbes vues à contre-jour de la « mangrove » strasbourgeoise gelée complètent mes photos de ce samedi matin.

J’achève cette sortie par un tri et un traitement rapide des photos pour livrer 35 images réalisées ce matin de janvier à l’Île du Rohrschollen. 35 photos dans lesquelles j’ai essayé de capter cette ambiance particulière qu’on peut trouver dans ce lieu unique de Strasbourg.